Tu écrivais
des textes courts
et percutants
quand, moi, j’écrivais
des textes fleuves.
Tu préférais les miens,
j’adorais les tiens.
Nos inspirations
se répondaient,
se stimulaient,
s’interpénétraient.

Parfois,
nous aurions pu finir
le texte de l’autre
tellement
nous nous connaissions bien,
au point
de nous deviner
et de nous émerveiller
sans cesse
de l’autre.
Mais
c’était tellement
plus charmant
d‘écouter l’autre
parler, lire ou déclamer,
avec tout son coeur,
ses tripes,
son être.

Parfois,
nous lisions en public
des textes anonymes
dont nous savions
qu’il était écrit
de l’autre.
Moments
d’intense complicité
qui nous rendaient forts,
invincibles,
certains
d’une amitié
indestructible.

Ces mots,
ce sont des élans
qui nous traversent
et qui nous nourrissent
nous entraînant
toujours plus loin
vers nous-même…
Nous, chacun de nous,
et nous… nous quoi !

Ces textes
qui s’interpénètrent
comme nos cœurs,
comme nos vies,
nos projets,
nos mains
parfois.

Pas nos corps,
pas tant que ça nos vies
finalement.
Nous avons été séparés
avant de savoir
que cela aurait pu être
possible.

Encore trop enfants
sûrement,
pétris des préjugés
qui nous entouraient,
nous n’avons pas su
accueillir l’évidence.
A un moment,
ca a été plus simple
de tout rejeter en bloc.
Pour toi.
Pas pour moi.

Z – 10/02/2025

source photo : blog tumblr 2sundowner69

Scène ordinaire d’un garçon ordinaire
Je le fis tourner,
et je m’éloignais ,
et
je lâchais sa main.
Comme s’il s’agissait d’un
« Au revoir. »,
comme si on venait de me briser le cœur.
Il avait besoin d’espace.
J’avais besoin d’espace …
Il fit donc un pas en arrière.
Moi aussi ….
Mon regard heurta le sol.
Il semblait réfléchir,
mais il ne se dégageait de lui qu’un soupir intérieur.
Il revint vers moi,
et reprit mes mains,
et me regarda dans les yeux.
Puis il gémit plutôt que dit
ces deux mots comme on demande une faveur,
comme s’il était au bout,
qu’il n’en pouvait plus,
qu’il fallait que ça sorte,
qu’il fallait que sa demande se réalise,
pour le maintenir en vie.
Dans un nouveau soupir de désespoir,
il me souffla :
« Embrasse-moi. »

®Ash

– – – –
Ash, toujours.
Poète incomparable.
Ces mots
qui sortent des tripes,
des tréfonds
de la douleur
et du désir de vivre.
Comme un cri.
Une exigence.
Et une invitation.
La vie qui crie
qu’elle veut vivre.
Parfois,
je me surprends
dans telle ou telle situation,
à me demander
ce que Ash
aurait saisi du moment
et comment
il l’aurait transformé
en un instant
essentiel.

Tu me manques, poète.
Tu me manques.

Z – 7/2/2025

Sources :
texte : blog tumblr de Ash, 30 déc 2015
photo : Répétitions pour le “Oscar Wilde Ballet” créé par Christopher Weldon avec the Australian Ballet (2024)

 

Il y a une lumière
qui brûle dans mon
cœur,

Mais les mots manquent,
je ne peux pas le
dire.

Je t’aime, je le sais
clairement,

Mais comment le dire
reste inhabituel
pour moi.

Ton sourire qui
illumine mon cœur,

Ton regard qui
illumine mon monde.

Mais quand je me tiens
devant toi, silencieux,

Est-ce que je perds courage,
pourquoi ?

La peur que tu ne partages pas
la même chose,

Que tu brises mon cœur
en morceaux.

Mais sans mots,
cela reste caché,

Mon cœur qui aime,
dans une douleur silencieuse.

Peut-être un regard,
un doux sourire,

Un signe
qui parle d’amour.

Parce que parfois
l’apparence en dit plus,

Comme des mots qui
soupèsent le cœur.

Mais un jour,
plein de courage,

Je parlerai, ça fera
du bien.

Je vais te dire ce qu’il y a
au fond de moi,

Mon cœur, il ne bat que
pour toi.

Flo

Source : texte/image : Florian Teurer

J’t’écris aujourd’hui juste parce que.
Parce que j’ai l’cœur su’l bord des lèvres
Pis qu’j’ai envie d’le cracher sur un papier.
Parce que j’ai l’amour su’l bout d’la langue
Comme un mot qu’j’arrive pas à m’rappeler.
Ça fait trop longtemps que j’garde ç’que j’ressens caché
Dans l’fond d’ma gorge.
Mais maintenant j’ai besoin d’t’en parler
Parce que j’suis tired d’jouer à cache-cache avec mes émotions.
Ç’pour ça que j’t’écris aujourd’hui. Juste parce que.
Parce que j’parle pas encore l’Amour.
Parce que ça fait des mois qu’mon cœur m’appelle
Mais qu’j’ai peur de répondre.
Parce que ça fait des semaines que ma tête essaie d’me parler
Mais que j’la comprends pas.
On communique pas dans la même langue, elle pis moi.
J’parle bien l’français, mais j’parle pas l’Amour.
« Je t’aime », c’est sept lettres que j’prononce mal.
J’préfère que mon crayon te l’dise à ma place.
T’façon, j’écris plus clair que j’parle.
C’est mes paroles qui sortent en pattes-de-mouche
Pas ma calligraphie.
Ç’pour ça que j’t’écris aujourd’hui.
Juste parce que ça m’chatouille en arrière du nombril
Quand t’es là.
Parce que j’pogne des chocs électriques en d’dans
Quand j’entends ton nom.
Parce que l’sang qui m’coulait dans les veines a été remplacé
Par un poison vibrant.
C’est l’effet qu’tu m’fais.
Ç’pour ça que j’t’écris.
Parce que j’parle pas encore l’Amour.
Parce que j’avais pas réalisé tout ça avant aujourd’hui.
P’t’être parce qu’on dit qu’l’amour rend aveugle.
Mais moi j’crois pas à ça.
J’pense juste que c’est dur de l’reconnaître quand y passe.
Une chance que je l’ai vu avant qu’y s’en aille.
Bref, aujourd’hui j’en profite pour t’écrire une lettre
Mais ma main qu’est gauche compose des phrases
Que j’arrive pas à déchiffrer.
Parce que j’parle pas encore l’Amour.
J’aimerais ça qu’tu me l’enseignes,
Ç’t’une langue que j’voudrais parler.
J’te demande pas la mer à boire
J’veux seulement qu’tu m’aimes un peu demain.
Pis après, si t’es capable
Promets-moi chaque jour de m’aimer un peu l’lendemain.
Ça serait bien.
Ç’pour ça que j’t’ai écrit aujourd’hui.
Juste pour ça.
Juste parce que.
Parce que j’parle pas encore l’Amour.

©Ash

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Ce souffle, cette force, ce dynamisme
qui entraîne en avant, nous invitant
à traverser toutes les émotions
en un instant et réveiller le vivant
en nous.

Ash, poète au souffle incomparable.
Ash, l’écorché, le blessé, le vivant,
soigneur des âmes
à son corps défendant.
Z.
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Photo : Adam Jakubowski photographié par Marcin Rychly, Silver District #8

L’homme nu

Je me suis retrouvé
nu
tel que j’étais
quand je suis né
À travers les ans
j’ai tenté
de me couvrir
de mille vêtements
et je n’y suis pas
parvenu
À quoi sert
un homme
nu ?
À rien.

Alberto Moravia,
L’homme nu et autres poèmes, Flammarion, 2021

Illustration : oeuvre de Kirill Faadeyev