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Les commentaires reçus à propos de ma dernière publication me rendent perplexe. Je comprends les encouragements à me dévoiler et à m’assumer. Oui, je comprends vraiment. Mais ce n’est pas si simple.

Comment expliquer cela ? Je ne cherche pas à être reconnu comme gay ; je le suis, c’est entendu, mais je ne suis pas que ça. Est-ce que m’afficher officiellement comme homosexuel résoudrait comme par magie mon mal être et me permettrait d’être heureux ? C’est, hélas, bien plus compliqué que cela. Avoir eu du mal à accepter et à assumer mon homosexualité n’est qu’un élément parmi d’autres de ma complexe personnalité.

C’est de m’accepter et de m’assumer tout court dont j’aurais besoin, l’homosexualité n’étant qu’une des facettes de ce dilemme terrible. Une illustration, un bon exemple. Pas le problème de fond.

Ce n’est pas que sur l’orientation sexuelle que je me cache, c’est dans tellement d’autres domaines ! Bien sûr, ça ne se voit pas. Je (me) suis autoconditionné à donner le change, à me le donner à moi-même. Je peux briller dans tel ou tel domaine, je peux m’investir à un point que l’on me trouve doué ou talentueux, je me peux me disperser dans de multiples directions, je peux même aider les autres, les soutenir, leur permettre de faire un pas de plus au service de leur développement et de leur épanouissement, et tout cela me réjouit bien entendu mais ne me comble pas. Ce ne sont que des fuites. Tout, n’importe quoi, si possible assez brillant pour m’apporter de la reconnaissance ou de l’auto-reconnaissance, plutôt que sentir à nouveau cette connexion vertigineuse à la possibilité du vide, du néant, qui entraînerait vers rien.

Ek-sister, sortir de moi. Vite, produire quelque chose à quoi se cramponner du moment que cela me sort de ce gouffre qui semble vouloir m’aspirer.

Cette expérience vécue bien longtemps avant que je ne sois éveillé à la sexualité et à une préférence affective ou sexuelle est première (j’y fait allusion dans un écrit lointain me semble-t-il, j’avais 6ans et demi). L’homosexualité n’est qu’un danger supplémentaire d’être jugé, rejeté, abandonné. Elle a été une méga question dans ma vie, elle l’était au moment où j’ai créé ce blog, elle ne l’est plus.

La seule question qui m’occupe est que je n’arrive pas à m’aimer moi-même. Et quand bien même un homme viendrait m’aimer, je ne saurais probablement pas dire si je me laisserais aimer par besoin de l’être et sans aimer à mon tour ou si je fuirais, autoconvaincu que c’est n’importe quoi, que l’échange réciproque parfait n’existe pas.

C’est terrible, cela se fait malgré moi. Il y a quelque chose d’archaïque en moi – une part de moi – qui veut sans cesse me protéger de la prochaine fois où l’on pourrait me faire sentir que je ne suis rien, que je n’ai rien à faire ici, que je pourrais disparaître alors que – réflexe salutaire de survie, mais à quel prix ! – je ne veux pas me laisser aspirer par ce néant. Je vous passe les détails mais cela se traduit globalement par l’accumulation de protections instinctives « au cas où » : prendre du poids au cas où l’on viendrait à manquer, tout savoir d’un sujet au cas où je serais pris en défaut de savoir, savoir faire moi-même au cas où les collaborations seraient défaillantes. Etc. Etc.

Dans le magma de mon existence, la question homosexuelle n’est finalement qu’une question parmi d’autres. Je ne suis pas homosexuel. Je suis un être humain, qui se trouve attiré affectivement par les hommes, qui a peur d’être parce qu’un jour – trop tôt, bien trop tôt ! – on lui a fait sentir qu’il pourrait ne pas être.

J’afficherai qui je suis quand je serais capable d’afficher tout qui je suis. C’est la seule chose qui vaille désormais. Le pire, c’est que je n’ai rien de honteux à cacher. Juste, j’ai peur d’exister. Peur du conflit, du rejet et de tout ce qui pourrait y ressembler ou y conduire. L’art de se paralyser soi-même.

Aussi, je remercie ceux qui m’encouragent au dévoilement et qui, probablement, pour ce qui les concerne tirent avantage de pouvoir vivre librement leur homosexualité. Mais comment fait-on pour rassurer et apprivoiser un être tapi au fond de sa tanière et qui a peur de sortir ? L’injonction ou l’appel de l’extérieur : « bon allez, viens, quoi ! sors de là » ne servent à rien. Soit il faut que je trouve la force intérieure de me lever et de sortir – j’y travaille ! – soit quelqu’un de bienveillant et attentionné – c’est une illusion, un rêve, probablement – saura me rejoindre, me prendre dans ses bras et me ramener avec lui.

Je comprends que cela puisse être désespérant pour ceux qui ont déjà fait ce chemin ou qui sont doués de pouvoir faire ces aller-retours facilement. Ce n’est pas mon cas. Merci en tout cas de me permettre d’approfondir ainsi cette question. Cela n’est certainement pas inutile.

Z- 26/01/2025

Photo : Franck sur un un-homme-nu.com

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Est-il possible de marcher sans but?
A vrai dire, aujourd’hui,
tout objectif me paraît bien éphémère,
illusion ou fuite en avant,
pour ne pas regarder sa souffrance,
ne pas sentir le manque d’amour.

Dans mon cas,
pour fuir aussi le trop d’amour qui surgit
et qui ne trouve pas d’écho.

Alors des occupations,
tel objectif de réussite, de prestige ou de carrière,
tel objectif de construire une famille , de reproduire un modèle,
tel objectif de sauver, secourir, donner aux autres,
tellement d’objectifs possibles
auxquels on peut s’identifier.

Je sais et je sens
– est-ce la même chose ?-
au fond de moi,
que le but n’a pas ou plus d’importance.

Oui, je peux marcher sans but.
C’est absolument terrifiant,
car cela veut dire arrêter de fuir,
arrêter de faire semblant,
arrêter de m’occuper
la tête, le coeur, les mains,
pour enfin oser
marcher en présence.

C’est absolument terrifiant,
il va falloir que j’affronte ma peur du vide,
ma peur de ne pas être aimé,
ma peur d’être rejeté,
ma peur de n’être rien ni personne.

C’est absolument terrifiant,
mais je ne veux plus fuir,
ni rien, ni personne,
ni moi-même.

Je veux marcher
en conscience,
en présence.

Je veux être qui je suis.

Mon espérance
est que ce soit toi, Seigneur,
qui m’appelle
du fond de mon être
à te retrouver.

Tu ne peux pas m’aimer
– je ne peux pas laisser ton amour me guérir –
si je ne m’accepte pas
tel que tu m’as fait,
si je n’arrête pas, un jour,
de fuir après des objectifs illusoires,
par peur de ne pas exister,
par peur d’être seul,
immensément seul et inutile
à tout et à tous.

Si j’arrête de courir, et me disperser,
telle Marthe qui s’agite pour faire mille choses,
si j’arrête et me pose à tes pieds,
comme Marie,fragile, disponible, vulnérable,
soumise à la critique des autres,
seras-tu là, mon amour,
coeur de mon coeur,
être de mon être ?

Présence de ma présence.

Je crois que je peux marcher sans but
si je marche en ta Présence.

Je dois passer la peur
de ce grand vide qui m’effraie
parce que je crains d’y ressentir à nouveau
cette blessure de ne pas exister
pas aimé, pas accueilli, pas reconnu.

Et pourtant je suis là,
j’existe.
tu m’as donné la vie,
et, au fond de moi,
je sens mon être s’agiter,
il veut paraître,
il veut te louer,
il veut te rendre gloire
par le seul fait d’être.

Le vivant, voilà ta gloire.

Alors, aussi grande soit ma peur,
je lâcherai un à un mes oripeaux
et m’approcherai autant que je peux,
et je marcherai en ta Présence,
mon Seigneur et mon Dieu.
Ma vie.
Vie de ma vie.

Le Seigneur ton Dieu est en toi, c’est lui, le héros qui apporte le salut. Il aura en toi sa joie et son allégresse, il te renouvellera par son amour ; il exultera pour toi et se réjouira

(Sophonie 3, 17)

Je marcherai en présence du Seigneur sur la terre des vivants.

(Ps 114,9)

amitié-tu-existes-pour-moi

 

Tu m’as écris ” tu es mon ami….”
Et je suis fier d’être ton ami.

Ce ne sont que quatre mots
mais tellement précieux.

C’est quoi être un ami ?
Probable que pour toi
ce n’est pas comme pour moi

Mais c’est un mot
qui est magique.

Un ami,
c’est tellement merveilleux
c’est une autorisation à vivre à deux
à plusieurs peu importe

Me dire “je suis ton ami”
ou “tu es mon ami”
c’est une déclaration d’existence.

J’existe
puisque le mot ami
a été prononcé quelque part
par quelqu’un qui le disait à propos de moi.

Ca peut te paraître curieux
que je sois sensible à ce point.

Je sais.

Ca peut même te faire peur,
en tout cas t’impressionner.

Tu peux te dire:
mais qu’est-ce qu’il me fait ?
Qu’est-ce que j’ai déclenché ?

Mon ami,
tu m’as juste dit
“tu existes pour moi”

Tu es mon ami
ça veut dire tout ça
et plein de choses
que je ne sais pas traduire en mots

Alors… merci !

Zabulon – 25 juillet 2014