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Je n’ai jamais aimé le terme “homosexuel”. Il a servi, pour moi, de repoussoir et a contribué à ce que je ne puisse accepter qui j’étais puisque longtemps il a été le seul mot qui me semblait disponible pour décrire qui j’étais. Mais c’était si réducteur : définir une personne par la sexualité. L’exercice de sa sexualité?

Je ne pouvais pas me reconnaître dans ce mot.

Mon expérience, ce n’est pas d’abord celle d’une attirance ou d’une préférence sexuelle. C’est celle d’une extrême sensibilité à quelque chose de l’ordre de la beauté chez autrui, et le constat que c’est principalement envers des personnes du même sexe que cela fonctionne pour moi.

Cela n’a pas vraiment à voir avec la beauté physique. Je ne dis pas que je suis insensible à la beauté d’un bel homme, mais outre que cela est très subjectif, ce n’est pas ce qui éveille ma sensibilité. Ce serait plutôt de l’ordre de la beauté intérieure, en tout cas de la beauté ressentie à l’intérieur de moi en écho à telle rencontre qui me la fait percevoir en l’autre. beauté intérieure et fragilité aussi. Et me voici en émoi. je sens comme un infini, comme une invitation. Invitation à quoi? Je ne sais pas. A vivre, à grandir, à se parler, à se rencontrer, même si nous n’avons rien à nous dire, rien à vivre vraiment concrètement.

Bref, une sensibilité à des choses cachées, non perceptibles au commun des mortels. Comme je me suis senti seul à ressentir de telles choses et à ne pas savoir comment les exprimer ni à qui. Je voyais bien que j’étais différent. Les quelques amis à qui je tentais de m’en ouvrir me regardaient bizarrement et me blessaient parfois quand ils coupaient court brutalement par des mots tels que “oh, je suis pas pd, moi!”. Suggérant quelque chose qui n’était même pas venu à mon esprit mais qui,soudain,  me remplissait de confusion intérieure.

Pd? Homosexuel? Que de grands mots, reçus confusément comme insultants, comme très connotés de désir sexuel, alors que je n’avais que le mot amitié à la bouche.

Ce pourquoi lorsque j’ai découvert le mot homosensible, je l’ai tout de suite adopté. Oui, je peux admettre que je suis attiré par les hommes, au sens où quelque chose en moi est sensible à la beauté intérieure de tel ou tel, au point de m’en émouvoir et d’imaginer une communion ou je ne sais quoi d’autre qui n’a pas d’intérêt ici. Avec le constat que c’est majoritairement avec des hommes que cela se produit.

J’avais donc à admettre cela, comme une différence sensible que je reconnaissais comme belle mais qu’il m’était impossible d’admettre au grand jour. Ni homosexuel, ni hétérosexuel. Différent : homosensible… et ne sachant pas quoi faire de cela, comment le comprendre, l’interpréter. Peut-être par défaut de maturité de ma part, la littérature que je trouvais sur le sujet ne me satisfaisait pas. On n’y parlait pas vraiment de moi, je ne m’y reconnaissais pas. Et le côté militant, dans un sens ou dans un autre m’agaçait terriblement, que ce soit pour brandir la fierté d’être gay ou que ce soit pour afficher une continence par amour du Seigneur. Ces deux voies étaient et demeurent en grande partie du “chinois” pour moi.

En fait, même si j’étais disposé à reconnaître que mes émois d’amitié, l’éveil de la beauté et de toute sensibilité créatrice étaient provoquées par des hommes à travers le croisement d’un regard, une attitude, un mot, une rencontre fortuite, cela ne se transformait pas forcément en désir sexuel et celui-là n’était en tout cas pas premier. Peut-être cette sensibilité était sexuée au sens où elle était touchée par la beauté intérieure quasi-exclusivement d’hommes, mais je ne pouvais pas faire le lien avec une préférence sexuelle. Sublimation peut-être.

Bref, homosensible oui, homosexuel non.

Et puis, récemment je suis tombé sur le site de la fraternité Aelred et le le blog de jonathan. Vraiment par hasard. Je recherchais une citation de Aelred de Rievaulx et suis tombé sur le site de la fraternité Aelred. J’ai lu rapidement. Intéressant, mais, de prime abord, cela m’a paru être une approche un peu en position haute et suggérant que l’amour d’amitié, chaste et continent, est la voie pour les homosexuels chrétiens. Je suis loin de partager cette opinion pour la raison simple que je ne crois pas que la sexualité n’a pour fin que la procréation. Pour moi, elle est aussi acte de tendresse qui réveille et révèle l’autre à lui-même, et cela même est création, co-création. Certainement, à certains il est donné de vivre une continence joyeuse, mais ce n’est pas la vocation de tous ; et pourquoi donc cela devrait être la vocation de tous les homosexuels?

Bon, passons, ce n’est pas le sujet du jour. C’est juste pour expliquer le contexte. De fil en aiguille, me voilà donc sur le blog de jonathan qui, bien que lié à la fraternité Aelred, présente une approche beaucoup plus humaine et sensible. L’auteur l’assume et l’explique d’ailleurs très bien.

Je commence donc à lire les témoignages proposés. Je n’ai pas eu besoin d’aller très loin. Même si mon histoire est différente, je me reconnais immédiatement dans le récit qui est fait, dès la première page, d’une personne sensible, sujette à des grands émois et cherchant de grandes amitiés. Je suis stupéfait. On parle de moi. Par exemple :

Je n’ai jamais « flashé » sur un garçon en raison de sa beauté corporelle. Je n’avais pas, à propos de celle-ci, ni type ni canon a priori. Je ne me suis donc jamais retourné dans la rue sur un bel homme. En revanche un regard croisé par hasard pouvait me faire chavirer le cœur. Ce n’était pas la beauté d’un corps, ni même la beauté de ses yeux qui me touchait, mais ce que le regard exprimait du plus secret de la personne. C’était soudain comme si je devinais ce qu’elle avait d’unique et cela m’attirait irrésistiblement et soulevait en moi le besoin impérieux de la rejoindre pour la connaître et, si possible, de l’aimer. Qu’y avait-il dans ces regards pour exercer sur moi une attraction si impérieuse ? J’y percevais toujours comme une mystérieuse blessure laissant entrevoir une enfance inachevée, parfois meurtrie. A chaque fois je plongeais corps et biens dans la béance d’un tel regard. Souvent la voix se joignait à lui. C’était toujours la voix de quelqu’un qui parlait doucement, posément, comme un enfant sage qui murmure son secret à un ami. Ces rencontres étaient aussi précieuses que rares et elles me bouleversaient si profondément que je restais à chaque fois interdit et paralysé devant celui qui m’attirait consciemment ou inconsciemment et qui peut-être même m’attendait.”

Puis l’auteur parle d’une amitié très pure en fait, de gestes venus naturellement d’une grande beauté et d’un grand respect. Même si ce n’est pas mon histoire, comment ne pas reconnaître que c’est ce que j’aurais aimé qu’il se fût passé?

Je lis, je lis. Et je prends conscience que ce que je prenais comme une hypersensibilité, largement enfouie et récemment réveillée (quelle coïncidence!), est peut-être justement l’indice d’une homosensibilité. Je ne veux pas théoriser ni généraliser sur le sujet, j’en serais bien incapable et incompétent, mais je prends conscience que ce que je croyais être chez moi une hypersensibilité neutre en soi n’est peut-être pas si neutre que cela.

Au même moment – coïncidence encore ! – me voilà intérieurement bouleversé à la fois par des bouillonnements spirituels et par une amitié douce et belle qui me touche profondément.

Pourquoi je raconte tout cela? Pas du tout pour raconter ma vie, ce qui n’est pas l’objet de ce blog et, concernant ma sexualité, vous pouvez être certains que cela n’arrivera pas. Mais me voilà face à une question redoutable : puis-je continuer à parler de Dieu, à prétendre le reconnaître, si c’est seulement mon extrême sensibilité qui s’exprime? Ce ne serait pas honnête, n’est ce pas?

Je ne dis pas que je ne crois plus en Dieu, je pense même que c’est exactement le contraire qui est et qui arrivera. Mais je prends le temps d’expliquer tout cela pour annoncer seulement que la vie de ce blog risque d’être un peu perturbée dans les temps qui viennent. Je souhaite explorer cette question de la sensibilité et cela va probablement m’occuper quelque temps.

A vrai dire, cela est déjà commencé avec l’article déjà publié sur l’intensité émotionnelle. Cet article décrit, en théorie, un phénomène que je connais bien, mais comme il traite de la douance, il est probable que cela ne décrit pas toute homosensibilité. De même que tous les enfants doués ou précoces ne sont pas forcément homosensibles. Encore que… il serait intéressant d’avoir des statistiques sur ce sujet.

Mes questions sont simples : d’où vient cette extrême sensibilité? Est-elle forcément ou majoritairement homosexuelle ? Et Dieu là dedans, réelle sensation spirituelle ou expression de l’hypersensibilité? Révélation ou sublimation?

Sur la deuxième question, j’ai cru comprendre par mes amis à orientation homosexuelle qu’ils se reconnaissaient plutôt comme ayant une sensibilité plus grande ou différente de ce qu’on nous décrit le plus souvent comme étant la norme.

Là encore, je n’en conclus rien. Sinon que mes amis semblent me ressembler, ou plutôt, c’est moi qui leur ressemble, ce que je niais fortement à l’intérieur de moi, auparavant.

Voyez, c’est tout un chemin.

Quiconque a envie de participer à cette réflexion est le bienvenu dans les commentaires. Espace modéré, bien sûr.

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De nombreuses personnes semblent ignorer que les émotions intenses font partie de la douance et l’intensité émotionnelle est donc peu étudiée. Historiquement, l’expression « intensité émotionnelle » était synonyme d’instabilité émotionnelle plutôt que d’une vie intérieure foisonnante. La vision occidentale classique est que les émotions et l’intelligence sont distinctes et opposées. Pourtant, il existe un lien indéniable entre les deux et, combinées, elles ont un impact certain sur les personnes douées. C’est l’intensité émotionnelle qui alimente la joie de vivre, la passion d’apprendre, la motivation nécessaire pour exprimer un talent ou atteindre un but.

Tout ressentir plus profondément que les autres peut être douloureux et effrayant. Les personnes douées qui souffrent d’intensité émotionnelle se sentent parfois anormales : « Il y a quelque chose qui cloche chez moi… peut-être que je suis fou/folle… personne d’autre ne ressent la même chose… ». Ces personnes sont parfois déchirées, se montrent critiques envers elles-mêmes, souffrent d’une grande anxiété et se sentent inférieures. La communauté médicale considère qu’il s’agit là de symptômes et conclut que ces personnes sont névrosées. Cependant, de telles manifestations sont inhérentes à la douance et fournissent la motivation dont les personnes douées ont besoin pour leur croissance personnelle et leur réussite.

Il est extrêmement important que les enfants doués apprennent que leur sensibilité exacerbée aux phénomènes qui les entourent est normale. Sinon, ils pourraient considérer cette intensité comme une preuve que quelque chose ne tourne pas rond chez eux. Les autres enfants pourraient se moquer d’un enfant surdoué qui réagirait fortement à un incident sans importance, accroissant encore le sentiment de différence de cet enfant. De plus, la sensibilité face à l’injustice et l’hypocrisie peut pousser de nombreux enfants surdoués à la dépression ou au cynisme dès leur plus jeune âge.

La chose la plus importante à apprendre à ces enfants est d’accepter leurs émotions : ils doivent se sentir compris et soutenus. Expliquez-leur que leurs sentiments intenses sont normaux parmi les enfants surdoués. Aidez-les à utiliser leur intelligence pour mieux se connaître et s’accepter tels qu’ils sont.

Lesley Sword

source citation : hautpotentielquebec (version anglaise : ici)