L’aveugle jeta son manteau,
bondit et courut vers Jésus.
(Marc 10,50)
Il jeta son manteau…
‘Himation’. C’est le mot grec que la traduction liturgique a pudiquement traduit par « manteau ». Voilà un terme qui est employé 59 fois dans le Nouveau Testament, et qui est traduit la plupart du temps par le mot vêtement, au singulier ou au pluriel. ‘Himation’ est notamment employé pour désigner le vêtement de Jésus dans l’épisode où une femme touche son “vêtement”, mais également lors de la Transfiguration quand ils deviennent « resplendissants », ou lorsque qu’on le dépouille avant la crucifixion.
Certains avancent que le mot ‘himation’ serait un dérivé de ‘ennumi’ (mettre dessus). Cet argument ne suffit pas à traduire le mot himation par manteau car tout vêtement est mis par-dessus le corps. Il n’est d’ailleurs jamais traduit de la sorte dans ses autres emplois, sauf en Mt 5,40 parce que dans le même verset un autre mot désigne la tunique portée sur le corps : ‘chiton‘: si on veut prendre ta tunique ( ton habit de dessous), donne ton vêtement en plus (ton habit de dessus) – à quoi pourrait-il donc servir de plus ! – Il existe d’autres mots grecs pour désigner un vêtement qui serait mis par-dessus les autres, un manteau. Ces termes sont également connus des évangélistes : par exemple, ‘chlamus’ (Mt 27) pour désigner le vêtement dont on recouvre Jésus lors de la Passion, ou en 2Ti 4, 13, le mot ‘phelones’ employé par saint Paul pour désigner le précieux manteau de voyage qu’il aimerait récupérer.
Mais on trouve également le mot ‘himastimos’, qui pourrait avoir la même racine, ‘himatizo’, recouvrir, se vêtir, et désigne une tunique qui touche et recouvre directement la peau.
Bref, si l’aveugle jeta son vêtement, il était nu. A moins qu’on imagine qu’il porte encore un caleçon sous sa tunique, ce qui n’était pas l’usage du temps, comme attesté en d’autres endroits de l’Evangile. D’autant que nous n’avons pas, là, affaire à un notable distingué dans ses vêtements et parures.
Bref, si l’aveugle jeta son vêtement, il était nu.
C’est nu qu’il bondit vers le Seigneur.
Dans sa nudité, il bondit,
Dans sa nudité, il court vers Jésus,
Dans sa nudité, il se reconnaît aveugle
Dans sa nudité, il demande à voir.
Avant cela, il est habillé socialement
Par son handicap, par son métier de mendiant,
Par le regard que lui renvoient les autres,
y compris celui des apôtres,
Par le regard qu’il a sur lui-même, sans doute,
puisqu’il n’a pas, de prime abord,
l’énergie de bondir de lui-même vers Jésus…
Mais si le Maître appelle,
si enfin la vérité peut se faire
et que justice nous soit rendue,
alors il faut aller, bondir,
nu, comme on est.
Quelle importance ?
Seigneur, tu me connais.
Je n‘ai rien à cacher,
Tu sais tout de mes aveuglements,
De mes handicaps,
De la vérité sur moi-même
que je ne connais pas
ou que je n’accepte pas encore,
Je n’ai rien à cacher
Si tu me dis : viens,
J’accours.
Nu.
Tel que je suis.
Nu,
Tel que tu m’as créé.
Nu tel que tu m’aimes.
Tel que tu me libères,
tel que tu me restaures
dans la dignité
Foin de ces apparats
et de tous ces faux habits.
Nu
Devant toi,
aucune importance.
Appelle-moi, Seigneur.
Z – 25 oct 2015
Merci de vos mots qui m’invitent à m’avancer vers Jésus tel que je suis.
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