Et pendant que je me tenais là, j’ai vu plus que ce que je peux dire et compris plus que ce que j’ai vu; car je voyais d’une manière sacrée les formes de toutes choses dans l’esprit, et la forme de toutes les formes telles qu’elles doivent vivre ensemble comme un seul être. Et j’ai vu que le cerceau sacré de mon peuple était l’un des nombreux cerceaux qui formaient un cercle aussi large que le jour et la lumière des étoiles. Au centre, un puissant arbre à fleurs abritait tous les enfants d’une mère et d’un père. Et j’ai vu que c’était saint.
Black Elk (1863-1950) Heȟáka Sápa Holy Man of the Oglala Sioux
Je voudrais quelque chose de beau, mais tu vois, pas quelque
chose qui vienne de l’extérieur, de ces beautés qui te séduisent un moment,
semblent te remplir et puis s’en vont parce qu’elles ne sont pas de toi.
Non, je voudrais vivre une vraie beauté. Tout à la fois, la sentir, la donner,
la partager, être tellement bien en elle que la question de la perdre ou la
trouver ne se pose pas, être comme chez soi en permanence et être bien.
Et où est donc cette
beauté alors ?
Je crois qu’elle est en moi, qu’elle est en toi, qu’elle est
en chacun. L’erreur commune est de la chercher à l’extérieur de nous , comme s’il
nous manquait quelque chose, alors qu’elle est déjà là en nous et ne
demande qu’à s’épanouir et se propager.
Se propager…
Oui. Tu sais, comme il est dit dans le Livre de l’Apocalypse :
« Voici que je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21, 5). J’ai
souvent pensé à cette phrase… S’il peut
faire toutes choses nouvelles dans le d’ancien, c’est qu’il puise en lui-même,
à la source de la vie et de la beauté.
On croit souvent, à tort, que l’Apocalyse est un livre qui annonce des
horreurs alors qu’il ne fait que dire la réalité du monde d’aujourd’hui. Un
monde de souffrances, de compromissions, de corruptions, qui ne rend pas
heureux. Et face à cet inachèvement, il y a Lui, qui fait toutes choses nouvelles.
Lui venu dans notre humanité. Donc moi aujourd’hui.
« Il y a un petit problème avec Noël.
Le nouveau-né que l’on célèbre, on va le massacrer quelques mois après, à Pâques…
Et puis on apprend que de ce massacre, on ne nous en veut pas.
C’est la plus vaste énigme qui soit :
celle de Pâques est plus grande que celle de Noël,
mais elles sont liées, comme les deux faces de la même pièce.
Qui n’a pas vu la terreur dans les yeux d’un nouveau-né ? Il faut imaginer une étoile tombée jusque dans la chambre surchauffée d’une maternité. Cette étoile ne comprend pas où elle est, ni ce qu’elle fait, et elle commence à ressentir les tremblements de la faim et de la soif, des menaces dont elle ne sait pas le nom.
L’extraordinaire est que celui qui est le plus exposé soit le plus grand donateur. Car évidemment, rien n’est plus réjouissant qu’un bébé.
Mais comment quelqu’un qui est mis en danger à chaque seconde de sa vie, quelqu’un qui est aussi anxieux, peut-il nous réjouir autant ? Un nouveau-né est le croisement de la plus grande angoisse et du plus grand apaisement.
On ne peut résoudre ce paradoxe.
Mais à l’entrevoir,
on sait qu’on a une réponse absolument informulable
à nos interrogations sur le sens de la vie.
Christian Bobin, abécedaire intime de Noël in La Vie
Il vient, Il vient !
Celui qui assume toute notre humanité.
Du fond des temps, il vient. Trop d’errances, d’égarements, d’enfermements.
Voilà que l’homme est fait pour la vie, la joie, le bonheur, le jaillissement de l’être, et il se morfond dans la souffrance, l’accusation, la culpabilité.
Est-ce que tu le crois, toi, que si cet homme Jésus est capable de vivre l’humanité sans rien lâcher de l’amour de Dieu pour lui, ce faisant, il nous ouvre un chemin ?
Il n’y a pas, ou plus, à être comme ceci ou comme cela, pour plaire à Dieu. Pas besoin de sacrifice sanglant ni de bouc émissaire, Pas besoin de se plaindre de telle imperfection ou se culpabiliser de telle impureté.
Ce ne sont pas les actes extérieurs qui comptent,
mais l’intention qui les porte.
Es-tu prêt à recevoir la vie en ton humanité comme Jésus est venu le vivre parmi nous?
Celui qui assume toute notre humanité, Il vient, Il vient.
Trois choses se télescopent en moi et cherchent un sens ensemble…
L’actualité d’un cri de colère et d’exaspération que le pouvoir en place ne veut ou ne peut pas entendre,
la liturgie de ce jour qui rappelle que, même si la voix de Dieu est d’abord une voix dans le désert, parce qu’elle est le sens de l’histoire, le sens de Dieu, le sens de l’humanité, elle sera performative,
et le rappel publié par différents journaux catholiques (La Croix, La Vie) de l’intervention de Mgr Marty, archevêque de Paris en 1968 rappelant à ses prêtres (!) que Dieu est toujours du coté de la justice, ce qui explique que non seulement Dieu n’est pas conservateur mais qu’il accompagne ( ou suscite?) toute mutation nécessaire à la justice….
La parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, le fils de Zacharie. Il parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant un baptême de conversion pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre des oracles d’Isaïe, le prophète : Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu.
(Lc 3, 1-6)
Dieu n’est pas conservateur. Le changement, la mutation ne sont pas a priori contraires à la volonté de Dieu. Dieu est pour la justice. Celui qui a faim et soif de justice ne peut accepter de voir durer les situations actuelles qui font violence aux faibles, écrasent la santé, la dignité, la liberté de millions d’homme et de femmes dans notre pays et plus encore dans le tiers-monde. »
François Marty, archevêque de Paris, mai 1968
Pour retrouver le texte au complet de Mgr Marty : la-croix.com