Sans son, ça chante
Et sans rythme, ça danse
Ecoute la musique inaudible.

 

Attribué à Mirabaï

 

Mirabaï (1498 – 1546) est une poétesse de l’hindouisme,  auteur de chants d’amour mystique dédiés au dieu Krishna et qui sont encre chantés dans le nord de l’Inde.  Le poème cité ici est mentionné par Michel Gay dans “Kabir : Une expérience mystique au-delà des religions“, Collection “Spiritualités vivantes, Albin Michel, 2012,  qui, lui-même le tient de Catherine Clément, La princesse mendiante, Editions du Panama 2007.

On retrouve dans ce poème une même source mysqtique que celle signalée, il y a quelques jours,chez le poète persan, Sohrab Sepehri, de tradition soufie.

Photo : Piero Méndez, modèle espagnol sur Instagram

Trois fois rien à faire pour transposer cette belle chanson en un chant d’amour mystique… Il suffit de se laisser aller à être cette rose, peu de chose, mais destinée à s’épanouir au soleil, à offrir ses couleurs, puis s’effacer pour entrer dans l’éternité… “Pourtant j’étais belle, Oui, j’étais la plus belle Des fleurs de ton jardin…”

Mon amie la rose

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Me l’a dit ce matin

A l’aurore je suis née
Baptisée de rosée
Je me suis épanouie
Heureuse et amoureuse
Aux rayons du soleil
Me suis fermée la nuit
Me suis réveillée vieille

Pourtant j’étais très belle
Oui, j’étais la plus belle
Des fleurs de ton jardin

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Me l’a dit ce matin

Vois le dieu qui m’a faite
Me fait courber la tête
Et je sens que je tombe
Et je sens que je tombe
Mon cœur est presque nu
J’ai le pied dans la tombe
Déjà je ne suis plus

Tu m’admirais hier
Et je serai poussière
Pour toujours demain

On est bien peu de chose
Et mon amie la rose
Est morte ce matin
La lune cette nuit
A veillé mon amie
Moi en rêve j’ai vu
Eblouissante et nue
Son âme qui dansait
Bien au-delà des nues
Et qui me souriait

Crois celui qui peut croire
Moi, j’ai besoin d’espoir
Sinon je ne suis rien

Ou bien si peu de chose
C’est mon amie la rose
Qui l’a dit hier matin

 

Paroles/Musique : Cecile Caulier / Jacques Lacome

 

Photo : Carlos Blank photographié par Pedro Lollet pour Summer Diary Project, Caracas – Venezuela

 

Les hauts, les bas,
regarde-les d’un même oeil !
Ne regarde pas le visible,
regarde l’invisible !
Il n’ y a pas d’aile,
il y a le signe d’un envol,
il n’ y a pas de chanteur,
il y a la trace d’un chant.

Sohrab Sepehri, Pârâh,
in : L’Orient du chagrin,
traduit du persan par Jalal Alaviniar,
Lettres persanes, 2009.

 

Photo : Jon Kortajarena


®Sylvain Rabouille

 

– Comment te trouver ?
– Tu ne me trouveras pas. Tu m’as déjà trouvé.
– Mais où es-tu ? Je ne te vois pas, je ne te sens pas
– Vraiment ?
– Sinon… cette sensation que tu es là tout proche, ce désir de te toucher ou être touché par toi.
– Tu vois.
– Mais tu es toujours ailleurs…
– Non. C’est toi qui es ailleurs. Moi, je suis là.
– Alors pourquoi suis-je empêtré par tout ce moi-même qui m’empêche de te voir ?
– Tu l’as dit : parce que tu es empêtré. Lâche…
– Mais…
– Quoi ?
– Mais… S’il n’y avait rien…
– Ah ! La voilà la vraie question de la foi. Celle de la confiance. Soit tu lâches encore un peu de toi. En fait, tout. Et tu avances. Soit tu restes sur le pas de la porte à voir de la lumière entre les jointures, à observer la fête de loin sans t’y laisser inviter.
– Ca paraît si simple et c’est si dur. D’avancer.
– Oui parce que tu te trompes de perspective. Comme souvent, tu considères les choses à l’envers comme dans un miroir, ou comme dans un négatif photographique et tu prends ce que tu vois pour la réalité.
– Je ne comprends pas.
– Essaie d’inverser les verbes de ta dernière phrase : Ca paraît si simple et c’est si dur. Ca donnerait quoi ?
– Ca donne : c’est si simple et ça paraît si dur.
– Voilà qui est juste. C’est exactement cela. Ca “paraît” dur, mais ce n’est qu’une illusion. C’est en fait simple ; il suffit d’être là avec moi. Il n’y a pas d’autre chemin. Arrêter les choses à l’envers, arrêter d’inverser les perspectives. Rentrer en toi pour me trouver plutôt que me chercher à l’extérieur. Toujours plus loin et plus profondément en toi. Donc, en lâchant tes pseudo-sécurités extérieures auquel tu te retiens comme au bastingage d’un bateau qui est en train de couler. Mais plonge ! Rejoins-moi !
– Ce truc-là, d’inverser les mots… C’est un des signes de dyslexie.
– Eh bien, prends-en leçon : pour beaucoup, ce qui empêche d’avancer, c’est cette sorte de dyslexie spirituelle.

Zabulon – 2 septembre 2017

Source image : oeuvre de Sylvain Rabouille, en vente sur son site ainsi que de nombreux autres sujets : sbrartisteblog.wordpress.com

James Charles

Une page de Bible vaut-elle une vie? Cette question ne vient pas de moi. Elle se trouve dans la belle chanson “The village” que Wrabel vient de dédier aux personnes transsexuelles pour exprimer la douleur de leur chemin à devenir qui ils/elles sont vraiment, en marge de la société, envers et contre toute apparence et convenance, souvent et presque toujours dans l’incompréhension et parfois le rejet de leurs proches. Le village, c’est donc la société en général, mais pas la société de masse, anonyme et multiculturelle. Non, le village, c’est le bourg dans lequel on vit, avec sa famille, ses voisins, ses camarades de classe ou de travail, les gens qu’on croise tous les matins en allant chercher son pain, promener son chien ou en se rendant à l’office religieux.

Et pourtant, ce n’est pas faute d’essayer d’être comme leur genre, leur sexe, leur apparence semblent dire qui ils ou elles sont, quitte à prier pour changer, à supplier Dieu, à appeler à l’aide, à se désespérer aussi puisqu’il ne répond pas à cette prière… Il en faut de la force et du courage pour comprendre que la libération ne peut être que dans l’acceptation de ce qu’on est. Et dans le combat pour que ce soit, alors qu’on aurait tellement voulu que cela soit naturel et facile, comme une plume qui vole dans le vent,une feuille qui se pose sur le sol, une araignée d’eau qui glisse avec douceur sur l’eau…

Alors, oui, je l’avoue, je suis touché particulièrement par le deuxième couplet de cette chanson dans lequel Wrabel exprime en gros le message suivant : Je vais à l’office le dimanche, ça devrait être un jour de paix, mais non, je suis un pécheur, je vais aller en enfer. Et des millions de fois j’ai dit les prières avec et comme les autres… C’est comme un mensonge bien enfoui dans la conscience des gens de foi, des disciples… Une condamnation silencieuse ou pas qui fait mourir à petit feu d’une male mort. Qn dirait que, sous prétexte de respecter la foi qu’on croit recevoir de la Bible, une page de la Bible ne vaut pas une vie…

Il y a vraiment quelque chose qui ne tourne pas rond dans le village !

The village / Le village
par Wrabel

No, your mom don’t get it
And your dad don’t get it
Uncle John don’t get it
And you can’t tell grandma ’cause her heart can’t take it
And she might not make it
They say, “don’t dare, don’t you even go there. Cutting off your long hair. You do as you’re told.”
Tell you, “wake up, go put on your makeup. This is just a phase you’re gonna outgrow.”

Non, ta mère ne l’entend pas
Et ton père ne l’entend pas
Oncle John ne l’entend pas
Et tu ne peux pas le dire à grand-mère car son cœur ne peut pas le prendre
Et elle pourrait ne pas y résister
Ils disent: “Ne t’y aventure pas, n’y va même pas. Coupe tes longs cheveux. Tu fais ce qu’on t’on te dit.”
Répète-toi, “réveille-toi, mets ton maquillage. Ce n’est qu’une phase que tu vas dépasser”.

There’s something wrong in the village
In the village, oh
They stare in the village
In the village, oh
There’s nothing wrong with you
It’s true, it’s true
There’s something wrong with the village
With the village
There’s something wrong with the village

Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village
Dans le village, oh
Ils ont le regard fixe dans le village
Dans le village, oh
Il n’y a rien de mal avec toi
C’est vrai, c’est vrai
Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village
Avec le village
Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village

Feel the rumors follow you from Monday all the way to Friday dinner
You got one day of shelter, then it’s Sunday hell to pay, you young lost sinner
Well I’ve been there, sitting in that same chair
Whispering that same prayer half a million times
It’s a lie though
Buried in disciples
One page of the Bible isn’t worth a life

Tu sens que les rumeurs te suivent du lundi jusqu’au vendredi soir
Tu as gagné un jour d’asile, et c’est dimanche, l’enfer à payer, toi, jeune pécheur perdu
Eh bien, je suis allé là-bas, m’assoir dans cette même chaise
Chuchotant cette même prière un demi-million de fois
C’est un mensonge
Enfoui dans les disciples
Une page de la Bible ne vaut pas une vie

There’s something wrong in the village
In the village, oh
They stare in the village
In the village, oh
There’s nothing wrong with you
It’s true, it’s true
There’s something wrong with the village
With the village
There’s something wrong with the village

Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village
Dans le village, oh
Ils ont le regard fixe dans le village
Dans le village, oh
Il n’y a rien de mal avec toi
C’est vrai, c’est vrai
Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village
Avec le village
Il y a quelque chose qui ne va pas avec le village

Photo : James Charles, cover-boy pour Maybelline