La compréhension chrétienne du développement spirituel est basée sur l’Incarnation. Cela signifie que la liberté, l’extase, l’ouverture se font dans la chair, non en s’en échappant. Par la venue de Dieu dans l’être humain, tout l’être, l’histoire et la nature, sont potentiellement transformés. Toute réalité devient médiatrice du mystère, donc sacramentelle, pour ceux qui peuvent le voir. Toute la nature est honorée.

. . . La vision sacramentelle de la réalité est une vision inclusive; elle inclut le Mystère de Dieu tel qu’il se manifeste dans la réalité «naturelle», c’est-à-dire expérimentée avec les sens. De plus, une vision sacramentelle reconnaît la présence de Dieu non seulement par le média du Corps (de l’Église), mais aussi par celui du corps (de l’être humain), ce qui veut dire qu’elle est communautaire sans rien abandonner de sa dimension personnelle, intime et physique.

. . . Le scandale de l’incarnation. . . Est aussi le «scandale» de la sexualité comme voie de croissance spirituelle. Pour que ces idées puissent être prises en compte, il faut abandonner la mentalité dualiste. En fait, une bonne compréhension théologique de la sacramentalité relie les polarités sans supprimer la tension entre elles. Elle affirme que la présence de Dieu n’est pas inventée par une gymnastique mentale, mais qu’elle est vraiment réelle: la divinité du Christ dans l’humanité est son attestation. Par l’Esprit, l’Incarnation s’étend et est réellement présente parmi nous.

Cette présence ne se communique pas automatiquement car comme toute interaction personnelle, elle n’a aucune existence objective; elle a une existence intersubjective. Comme un baiser, elle n’existe pas objectivement, attendant dans une pièce pour être automatiquement distribuée quand les gens entrent. C’est une forme de don de soi, de présence, dépendant pour son efficacité non seulement de l’action du donneur mais aussi du récepteur. C’est, selon les mots de Rilke, une «transformation du monde visible en dehors de nous en un monde invisible à l’intérieur». Il serait donc faux, parce qu’affirmer plus que la vérité ne peut supporter, de dire que Dieu est «présent» dans la vie sexuelle. Si la compréhension sacramentelle est absente ou mal représentée, la donation gracieuse de Dieu ne se trouvera pas présente.

. . . Une vision sacramentelle de la sexualité exige l’inclusion réfléchie de la dimension spirituelle qui est déjà là; une théologie sacramentelle doit inclure la sexualité. Le potentiel sacramentel de la sexualité ne signifie pas qu’il doit être sorti de ce monde dans une sorte de culte spécialement “religieux”. Karl Rahner a perçu l’événement sacramentel, non comme le mouvement de l’Eglise vers le monde «pour le sauver», mais comme le mouvement de l’Esprit qui nous conduit depuis le monde, c’est-à-dire du centre personnel le plus profond de ceux qui sont ses sujets pensants, emmenant la vie séculière normale de l’homme vers son plein accomplissement en Dieu.

Plus concrètement concernant la sexualité, cela veut dire que le dynamisme de la sexualité elle-même révèle la sainteté des êtres humains et du monde dans son aspect profane.

Une bande dessinée de Peanuts (par Charles Schultz) montre Linus au piano. Alors qu’il est en train de jouer, les notes s’écoulent. Snoopy, couché sur la niche, ne perçoit pas des notes mais des os pour chien. C’est ça, la sacramentalité. La manifestation de Dieu se dit dans notre dimension dans un mode que nous pouvons reconnaître. . . comme le désir de nos cœurs, quelle que soit la forme qu’il puisse prendre.

Joan Timmerman
Sexuality and Spiritual Growth” (Crossroads, New York, 1992).

Source texte: cité par thewildreed

Paradoxe.
Il y a parfois en nous une fragilité et une résistance
et elles semblent s’exercer sur le même objet.

Fragilité des premiers instants,
blessure du non accueil, de l’abandon ou de la maltraitance,
blessure de ne pas être vu, ou reconnu, ou aimé,
blessure du sourire non rendu au moment où il te fait vivre,
blessure de l’existence – à quoi je sers, qu’est-ce que je fais là ?
blessure d’avoir à faire plaisir, se conformer, pour survivre.
Oubli de soi. Juste besoin de survivre.
Blessure du narcissisme premier.
Fragilité qui se réveillera avec les grandes contrariétés de la vie,
avec le risque de retomber dans l’instinct de survie, le repli sur soi
le désir vain de plaire, d’une confirmation extérieure,
et même l’attente d’un sauveur, d’une solution « magique »,
la peur panique et inconsciente de ne pas survivre
que certains appellent – abusivement – victimisation,
et qui est en fait un appel à l’aide:
“Au secours, sauvez-moi, je ne sais pas me débrouiller seul,
Je n’ai pas appris à avoir confiance en mes pas.”
Blessure du narcissisme premier.

Résistance.
Résistance qui serait fierté si elle n’était pas aveuglement.
Résistance d’avoir survécu en lâchant ce qu’il y avait à lâcher pour survivre
sans jamais perdre la conscience inconsciente d’un être violenté et différent,
résistance enfouie dans les profondeurs du non-verbal – Je suis. Je veux vivre.
résistance à croire qu’on peut être aimé – qu’est-ce que ça cache ?
résistance face à toute contrainte quand bien même ce serait pour mon bien,
résistance – je ne me donne pas, j’ai déjà lâché tout ce que j’avais à lâcher.
résistance face à tout ce qui peut être ressenti comme un danger.
Bravade, panache, force, pour les uns ou les autres.
Seulement, l’instinct de survie.
Résistance enfouie, résistance de la blessure.
Résistance.

Double paradoxe.
S’identifier au monde externe et en attendre sa bénédiction,,. pour survivre
et, au fond, dénier toute valeur à cette contrainte originelle.
Souhaiter vivre et avancer en confiance, chercher l’authenticité jusqu’à la nudité même,
et se heurter ou être retenu par cette réticence première qui dit : attention, danger !

Que faire ?
Que faire quand ça résiste,
Que ça résiste malgré soi ?

Déjà, tu sais
que ça résiste, c’est bien.

Maintenant, dialoguons.

Qui résiste ?
Quelle partie de toi résiste ?

Quand tu résistes comme ça, sans discernement,
que protèges-tu ?
Quelle peur as-tu ?
Et…de quoi as-tu besoin ?
De quoi as-tu besoin qui ferait
que tu ne résisterais pas ?

Tu résistes, tu es fort, et c’est bien.
Grands dieux ! grâce à toi, j’ai survécu !
Tu m’as protégé, maintenu intègre.
Mais tu résistes, tu es fort et c’est souvent inconfortable, inadapté.
Tu résistes sans savoir à quoi tu résistes
et tu m’empêches d’avancer vers de bonnes choses
pour toi… pour moi.

Je ne peux pas avancer sans toi, c’est trop clair
et pourtant je dois avancer.
J’ai besoin de ta force,
sans elle, je suis si fragile que je peine à avancer.

Là, tu es malheureux et seul
dans la tour d’ivoire que tu t’es créée
et moi je suis seul et malheureux
dans la quête d’ouverture que je ne peux réaliser.

Je te propose un deal.
Faisons chemin ensemble.
Ouvre-toi, laisse-moi m’ouvrir.
Je te protégerai, nous marcherons ensemble,
Ta force sera la bienvenue.

Finalement,
il faut juste ouvrir les portes et les fenêtres et la grille du jardin
de notre maison,
mais elle est solide, notre maison, tu as vu comme elle est solide ?

Veux-tu bien que nous nous déployons
dans une maison ensoleillée où l’air, les odeurs circulent,
où l’on peut accueillir à notre convenance les amis, les rencontres.
Vivre dans une maison ensoleillée,
tu le mérites, je le mérite.

S’il te plaît, faisons ça.

Z – 9/3/2017

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P.S. J’ai hésité à poster ce texte. D’abord parce que c’est intime, et qu’on donne dans le psycho. Ensuite, parce que cela semble sans rapport avec la question de l’homosexualité et la vie spirituelle. Sur ce deuxième point, il se pourrait pourtant qu’il y ait des liens que je ne vois pas encore. Et puis, j’ai la chance d’avoir les mots qui me viennent facilement,peut-être ces mots-là rejoindront l’un ou l’autre qui les cherchaient sans le savoir?
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Source photo : cuatro

Savons-nous vraiment ce que le Nouveau Testament entend par « évangéliser » ?

En grec, le verbe est utilisé pour résumer l’expression « annoncer une bonne nouvelle » : quelqu’un « d’évangélisé » est, en somme, quelqu’un qui a été « mis au courant ». Le verbe peut être employé pour l’annonce d’une naissance, d’un armistice ou pour l’avènement d’un nouveau dirigeant, il n’a donc au départ rien de religieux. C’est pourtant ce mot-là, presque trop banal, que les chrétiens ont choisi pour décrire le plus précieux de leur foi : l’annonce de la résurrection du Christ. Ce qui est intéressant, c’est que le verbe a peu à peu perdu son complément. On n’a plus dit : « mettre au courant quelqu’un de la résurrection du Christ », mais simplement : « évangéliser quelqu’un ». C’était bien sûr pour aller plus vite, mais ce manque de complément a aussi un sens plus profond.

Annoncer la Bonne Nouvelle de la résurrection n’est pas pour les chrétiens parler d’une doctrine à apprendre par cœur ou du contenu d’une sagesse à méditer. Évangéliser est avant tout témoigner d’une transformation à l’intérieur même de l’être humain : par la résurrection du Christ, c’est notre propre résurrection qui a déjà commencé. Par son infini respect vis-à-vis de ceux qu’il rencontrait (visible à travers les guérisons rapportées dans les Évangiles), par son abaissement pour ne laisser personne plus bas que lui (c’est le sens de son baptême), le Christ Jésus a redonné valeur et dignité à chacun. Encore plus : Jésus a été avec nous dans la mort, pour que nous puissions être près de lui dans sa communion avec le Père. Par cet « admirable échange » (Liturgie de Pâques), nous découvrons que nous sommes pleinement acceptés en Dieu, pleinement assumés par lui tels que nous sommes. Les chrétiens des premiers siècles ont résumé tout ceci en disant : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu ! »

Évangéliser n’est donc pas avant tout parler de Jésus à quelqu’un mais, bien plus profondément, le rendre attentif à la valeur qu’il a aux yeux de Dieu. Évangéliser, c’est lui transmettre ces mots de Dieu qui retentissent cinq siècles avant le Christ : « Tu as du prix à mes yeux, et je t’aime » (Isaïe 43, 4). Depuis le matin de Pâques, nous savons que Dieu n’a pas hésité à tout donner pour que jamais nous n’oubliions ce que nous valons.

(Taizé)

Source texte : www.taize.fr

Source photo : Le monde de Ionath

A quoi ça sert…

A quoi ça sert de se dévoiler, de se lier, de s’éveiller,
si c’est pour que la relation s’interrompe,
à quoi ça sert de s’émouvoir, s’enthousiasmer, s’extasier,
se remettre en cause, discuter, échanger
quand dès le départ quelque chose était faussé,
à quoi ça sert de faire semblant qu’une rencontre est profitable
quand elle s’interrompt brutalement?

A quoi ça sert…
De croire en l’autre,
s’émerveiller de ce qu’il est,
se découvrir grâce à lui
et qu’il disparaisse…

A quoi ça sert…

Et pourtant tout sert.

Z – 23/02/2017

Bright Light Bright Light (Rod Thomas) – ‘Moves’


Now when you’re face to face with someone, what do you see?
When you look at their reflection, isn’t it me?

Cos I can see you in me and me in you,
and no matter what the distance it comes through.

In a laugh, in a shadow, in a dream, when we move,
no matter what the distance it comes through.

We can move apart I guess
and I can move along I guess
and I can do my best, I guess,
but then what’s the use?
When it’s all I knew,
moving on’s the hardest thing to do.

Now when I’m face to face with someone what do I feel?
When you’ve opened up to someone how do you heal?
When there’s nothing left in me to get me through,
when all I feel is distance, what do I do?
With a laugh comes a shadow,
with a dream comes a move of all the things
I hide inside me right back into view.

We can move apart I guess
and I can move along I guess
and I can do my best I guess
but then what’s the use?

 

Et quand tu es face à face avec quelqu’un, que vois-tu?
Quand tu regardes son reflet, n’est-ce pas moi?

Pass’que je peux te voir en moi et moi en toi,
peu importe la distance qu’il peut y avoir.

Dans un rire, dans une ombre, dans un rêve, quand on bouge,
peu importe la distance qu’il peut y avoir.

Nous pouvons nous éloigner, j’imagine,
et je peux avancer, j’imagine,
et je peux faire de mon mieux, j’imagine,
mais alors à quoi ça sert?
Quand c’est tout ce que je sais faire
Me déplacer sur ce qui est le plus difficile.

Et quand je suis face à face avec quelqu’un, qu’est-ce que je ressens ?
Quand tu t’es ouvert à quelqu’un, comment guérir?
Quand il ne reste plus rien en moi pour traverser,
Quand je ne ressens plus que cette distance, que dois-je faire?
Avec le rire surgit une ombre,
avec le rêve le déplacement de toutes les choses
que je cache au fond de moi au premier plan.

Nous pouvons nous éloigner, j’imagine,
et je peux avancer, j’imagine,
et je peux faire de mon mieux, j’imagine,
mais alors à quoi ça sert?

Source Photo : Photographie prise par Bertil Nilsson, tirée de The Contemporary Circus Artist (Canalside Books,2011).

“Toutes les malédictions ont aussi leur bon côté. La première fois que, dans la rue, j’ai pris la main d’un garçon dans la mienne, que je l’ai serré contre moi, que je l’ai embrassé, en sentant peser sur nous les regards lourds des passants… j’ai aussi compris que nous avions une chance.

Ces gestes, j’étais certain de ne jamais les faire par hypocrisie, par convention, ou par habitude : seul un amour, seule une tendresse plus forte que les tabous les rendaient possibles…”

Eric Sagan, auteur de “Lettre à Hervé”

Source texte : page facebook de Eric Sagan du 25 décembre 2016

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