ואת-זכר–לא תשכב, משכבי אשה: תועבה, הוא.
“Tu ne coucheras pas avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination.”
LÉVITIQUE 18:22
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Je reproduis ici l’excellent article de Joël Hoffman, linguiste à New York, article auquel, j’ai déjà fait allusion ici. En fait, c’est tout le dossier paru dans ce numéro de la revue Tenoua qui est extraordinaire de clarté sur ce passage du Lévitique qui est si souvent invoqué pour condamner et l’homosexualité et les homosexuels alors qu’un travail exégétique sérieux ne permet pas cette conclusion rigoriste sinon abusive. Mais voyons d’abord quelles sont les 5 déformations que l’on fait subir à ce texte quand on n’y prend pas garde.
Z.
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Il existe, concernant le Lévitique 18:22 cinq déformations importantes entre la lecture moderne et le sens ancien du texte.
Au cœur de ce verset, les rapports sexuels entre hommes sont qualifiés de toeva en hébreu, communément en français : « abomination ». C’est la première déformation. Le terme hébreu toeva signifie « tabou » – un acte inapproprié en raison des normes sociales et non un mal absolu. Isolé, donc, le Lévitique18:22 parle de tabou, et non d’abomination.
Le contexte, cependant, nous éloigne de ces nuances de toeva pour nous rapprocher du modèle général du Lévitique 18, chapitre dans lequel plusieurs synonymes décrivent des comportements indésirables: toeva ici, zimah (« crime ») plus haut, tevel (« perversion ») plus loin, etc. Par ce contexte, le Lévitique 18 liste des pratiques indésirables, quelles que soient les subtilités du terme hébreu toeva.
Mais pour indésirables qu’ils soient, ces actes ne sont pas qualifiés de « péchés ». La deuxième déformation, donc, est de prétendre que le Lévitique 18:22 parle de péché.
La troisième déformation consiste à étendre le domaine du Lévitique 18:22 à l’homosexualité en général. Il ne s’agit ici que d’un acte homosexuel masculin spécifique.
La quatrième déformation se fait en sens inverse : en s’appuyant sur le langage euphémistique (ne pas coucher avec un homme « comme on couche avec une femme »), certains suggèrent que les rapports sexuels entre deux hommes ne posent pas de problème tant qu’ils ne sont pas exactement identiques aux rapports sexuels entre un homme et une femme. Ceux-là se méprennent sur la façon dont fonctionnent les euphémismes.
Finalement, le Lévitique 18:22 ne fait qu’une ligne (ou deux si on y ajoute son double en Lévitique 20:13). La cinquième déformation consiste à considérer ces deux lignes hostiles aux rapports sexuels entre hommes comme plus importantes que, par exemple, le verset similaire de Lévitique 19:19 (qui proscrit le port d’un « vêtement tissé de deux espèces de fils » différentes).
Débarrassé de ces cinq déformations, le Lévitique 18:22 réprouve un acte homosexuel masculin, parmi une longue liste de prohibitions anciennes, dont bon nombre sont souvent ignorées dans le monde moderne, tant par nos contemporains religieux que laïcs.
Le Dr Joel M. Hoffman est spécialiste de la Bible à New York. Son dernier ouvrage, The Bible’s Cutting Room Floor: The Holy Scriptures Missing From Your Bible est paru en septembre 2014. Plus d’informations sur www.lashon.net
Source : Tenoua – été 2015
Source image : photographie issue du film Tu n’aimeras point (titre original עיניים פקוחות, titre anglais Eyes Wide Open), 2009.