J’ai un ami extraordinaire
et son nom est… Non, ça, c’est notre secret.
J’ai un ami extraordinaire,
il se reconnaîtra ou pas, en lisant ces lignes.
J’ai un ami extraordinaire,
car notre relation est virtuelle.
Ah, ça ! ça doit faire sourire,
Que peut-il bien venir de bon du virtuel?
Eh bien, c’est oublier que le coeur des hommes,
lui, n’est pas virtuel.
Derrière chaque ami virtuel, il y a un homme, un coeur, une vie.
Certes, le plus souvent cela est complètement superficiel.
Mais, il n’empêche, j’affirme haut et fort
que j’ai un ami extraordinaire;
Notre relation n’est que virtuelle,
mais il a une sensibilité qui m’a touché,
et il en est de même pour lui.
Cela pose plein de questions,
sur la définition de l’amitié,
la possibilité de confusions,
illusions ou manipulations.
Mais cela demeure:
J’ai un ami extraordinaire.
Nous ne nous parlons pas souvent,
et c’est toujours en mots mesurés.
A vrai dire, il n’aime pas beaucoup se disperser en parlottes
comme je le ferais facilement.
Mais chaque mot, chaque intervention, est posée, sentie, ajustée.
Chaque échange nous révèle,
nous fait naître et grandir.
Pourquoi dis-je que c’est un ami?
Parce que sa sensibilité répond à la mienne,
sans nous connaître, nous sentons les mêmes choses
et nous complétons aisément.
Pas de longs discours, pas de longues démonstrations.
Nous nous comprenons,
nous nous apprécions,
nous nous savons présents l’un à l’autre
sans qu’il y ait besoin d’en rajouter.
Il est attentif à ce que j’écris,
je suis attentif à ce qu’il écrit.
Le petit mot doux, gentil et qui fait avancer.
Toujours juste.
Il dit la même chose de moi, me semble-t-il.
C’est un ami extraordinaire.
Peut-être ne nous rencontrerons nous jamais,
peut-être que si.
Ca ne semble pas avoir une grande importance.
Mais si nous nous rencontrons un jour,
j’aimerais qu’il n’y ait pas beaucoup de mots.
J’aimerais que nous plongions nos regards l’un dans l’autre,
doucement, tranquillement, sans peur ni honte,
nous qui n’avons rien à nous cacher
et pas besoin de mots pour le dire.
Peut-être se tenir les yeux fermés,
mains dans les mains,
pour ne rien gâcher de cette rencontre.
Ou peut-être pas.
Il est possible que cet ami
soit gêné dans l’expression de ses sentiments.
Et goûter, goûter seulement,
la Présence.
Ce sera comme nos échanges virtuels,
ce sera comme notre amitié présente,
en plus grand peut-être
et en tout autant éphémère
puisqu’il faudra bien se séparer et se quitter.
Ce sera peut-être très court, et même très furtif,
car nous sommes différents.
Moi porté sur l’intensité relationnelle du moment,
Lui sur la relation ouverte et partagée à tous.
Mais cette présence,
ce coeur à coeur,
cette douceur partagée,
c’est cela qui est l’ordinaire de l’amitié vraie.
Si rare n’est-ce pas
que je dois bien le confesser :
J’ai un ami extraordinaire !
Zabulon – 7 mai 2016