Va vers le pays que je t’indiquerai.
Va vers toi-même.

Deviens toi-même,
Deviens qui tu es.

Découvre qui je suis.
Que je suis.

Libère-toi de ces entraves
qui t’empêchent de te déployer
et d’être vivant.

Sors de ces pseudos-sécurités
et avance en eaux profondes
pour goûter la saveur de la rencontre
quand tu es enfin aimé
sans conditions,
sans comptes à rendre,
sans justifications.

Juste être toi
et avancer toujours plus loin
dans le détachement
pour être toi,
juste toi.

C’est bien suffisant.
C’est tellement beau.

Souviens-toi que tu seras toujours
un vagabond sur cette terre
à la recherche de la vérité.

Souviens-t-en
pour ne pas tomber dans l’orgueil
ou dans l’accaparement
des biens, de la connaissance ou du pouvoir.

Quel pouvoir ?
Tu n’as rien de précieux que tu n’aies reçu
sans suivre mon invitation
à aller vers toi-même,
là où nous sommes,
là où se fait la rencontre.

Souviens-toi d’où tu viens
souviens-toi que cette promesse de terre promise
n’est pas que pour toi.
Elle est pour toi et pour autrui,
elle ne t’appartient pas.

Cet autre que tu croises,
il est un étranger comme toi sur cette terre,
il est invité comme toi à aller
vers le pays de lui-même
que je lui indiquerai.

Cet autre, ton frère, ta soeur.
Cet autre, l’exclu, l’humilié, le rejeté.
Cet autre qui cherche la paix, la liberté, la libération.
Ton frère, ta soeur.

Pourquoi passer du temps à vous séparer
alors qu’au fond vous êtes uns
et qu’ultimement
vous vous retrouverez ?

Rejoindre.
Te rejoindre,
se rejoindre,
nous rejoindre.

A aller vers toi-même,
ce n’est pas seulement moi que tu trouves,
c’est l’humanité que tu rejoins.

Toute humanité.

Z – 10 avril 2025

source image : blog tumblr de @metamorphicmuse

Il y a quelque temps
je croisais
chaque matin
un garçon
qui attendait
le bus de 7h32.

Il était sombre,
ténébreux,
l’air renfrogné,
le regard figé sur le bitume,
ne parlant à personne.

Je me demandais
quel poids
il pouvait porter
pour paraître ainsi
si antipathique
alors qu’il avait toute la vie
devant lui.

Peut-être
simplement était-ce son humeur du matin,
l’air des gens mal réveillés,
qu’ils aient pris ou non
leur café.
Ou bien
ça le gonflait
de prendre ce bus de 7h32
pour se rendre dans une fac
où il s’ennuyait mortellement ?
Ou bien…
Ou bien…
Je ne sais pas.
Toujours est-il
qu’il n’était pas heureux.

Je me suis habitué à le croiser.
Jamais nous ne nous sommes parlés
mais je me suis pris d’affection pour lui.
J’espérais qu’un jour
je verrais un sourire apparaître sur ses lèvres
ou le voir s’intéresser à ce qui l’entoure.
J’espérais voir
un signe de vie.

Et puis il a disparu.
Un matin.
Et le suivant,
et puis le suivant
et ainsi de suite.
Il n’était plus là.

C’est bizarre
ce sentiment étrange
qui fait que je pense encore à lui
aujourd’hui
comme s’il me manquait
ou plutôt
comme s’il manquait
quelque chose.

Mais quoi ?
Je ne le connais pas.
Je n’ai pas eu envie de le connaître davantage
Il est juste l’inconnu
ténébreux
dont j’ai pensé qu’il était malheureux
et qui attendait le bus de 7h32.

J’espère juste
qu’il a trouvé son chemin.

Z – 11/04/2025

source photo : www.wallpaperflare.com


J’veux pas une relation compliquée.
J’veux pas un plan cul non plus.
J’veux pas des “je t’aime” toutes les minutes.
J’veux des baisers volés.
Au coin de mes lèvres.
Des attentions surprenantes mais cachées.
J’veux pas un bouquet de fleur ou une Ferrari.
Qu’est ce que j’en ai à foutre franchement?
L’amour ça s’achète pas.

L’amour c’est les petites conneries du quotidien, qui sont incompréhensibles aux yeux des autres, mais lui il te connaît bien, et ça t’a fait rire, et t’as pensé toute la journée, le sourire au lèvres, à ce crétin.

J’veux un truc spontané, peut être un peu bancal mais vivant.
J’veux des risques, des incertitudes.
J’veux sentir battre mon coeur tellement fort qu’il menacerait d’exploser.
J’veux des rires, des éclats de rires incessants.
J’veux qu’on redevienne des enfants, qu’on redevienne insoumis.
Insouciants.

J’veux un jeu, quelque chose qui peut basculer à tout instant tu vois.
J’veux un truc qui chamboulera ma vie, qui remuera mon coeur.
J’veux une relation complètement dingue qui nique tous les interdits.
Qu’on s’aime et qu’on se dise “amis”.
J’veux trouver quelqu’un qu’a pas froid aux yeux.
J’veux une personne qui aura du courage pour deux.
Parce que moi à part rêver je sais pas faire mieux.
En ce moment.

©Ash, toujours,
tellement vivant,
tellement inspirant,
tellement stimulant
et dérangeant aussi
parce qu’il te pousse
au bout de toi-même.

source texte : blog tumblr de Ash
source photo : Yiorgos Paraskeva

Tu me cherches ? Je suis assis à côté de toi.
Mon épaule est tout contre la tienne.

Tu ne me trouveras ni dans les stupas*,
ni dans les salles des sanctuaires indiens,
ni dans les synagogues, ni dans les cathédrales,
ni dans les messes, ni dans les kirtans*,
ni dans les jambes enroulées autour de ton cou,
ni en ne mangeant que des légumes.

Quand tu me chercheras vraiment,
tu me verras instantanément.
Tu me trouveras dans le plus petit espace du temps.

Kabir dit : disciple, dis-moi, qu’est-ce que Dieu ?
Il est le souffle à l’intérieur du souffle.

Kabir

(*) Le stupa est un édifice religieux bouddhiste, sorte de reliquaire symbolique du corps de Bouddha; le kirtan est un chant dévotionnel indien

Dans ce poème comme dans d’autres que j’ai déjà postés, Kabir, poète indien du XVè siècle, exprime combien la divinité est proche de nous et combien les dévotions peuvent ne nous servir à rien pour le rencontrer si elles nous dispensent de nous ouvrir à l’indicible présence qui est déjà là, tout contre nous, dans le moindre espace infime de temps, pour en pas dire déjà en nous.
Ce Dieu infiniment plus présent à nous que nous-même – dirait saint Augustin, pourquoi aller le chercher ailleurs dans une quête éperdue et vaine ? Avec la grande tradition apophatique, Kabir nous enseigne que sur Dieu on ne peut rien dire, que les mots sont vains parce que toujours en deça de la réalité, et que la rencontre avec la divinité ne peut se faire que par l’expérience d’être présent à soi, plus exactement : à elle en soi.

O Seigneur incréé qui Te servira ?
Chaque fidèle adore le Dieu qu’il se crée ; chaque jour il en reçoit les faveurs.
Aucuns ne le cherchent Lui, le Parfait, le Brahma, l’indivisible Seigneur.
Ils croient en dix Avatars ; mais un Avatar, endurant les conséquences de ses actes, ne peut être l’Esprit infini.
L’Un suprême doit être autre.
Les Yogi, les Sangasi, les Ascètes se disputent entre eux.
Kabir dit : “O, frère, celui qui a vu le rayonnement de son amour, celui-là est sauvé.”

Kabir

Image :

Scène ordinaire d’un garçon ordinaire
Je le fis tourner,
et je m’éloignais ,
et
je lâchais sa main.
Comme s’il s’agissait d’un
« Au revoir. »,
comme si on venait de me briser le cœur.
Il avait besoin d’espace.
J’avais besoin d’espace …
Il fit donc un pas en arrière.
Moi aussi ….
Mon regard heurta le sol.
Il semblait réfléchir,
mais il ne se dégageait de lui qu’un soupir intérieur.
Il revint vers moi,
et reprit mes mains,
et me regarda dans les yeux.
Puis il gémit plutôt que dit
ces deux mots comme on demande une faveur,
comme s’il était au bout,
qu’il n’en pouvait plus,
qu’il fallait que ça sorte,
qu’il fallait que sa demande se réalise,
pour le maintenir en vie.
Dans un nouveau soupir de désespoir,
il me souffla :
« Embrasse-moi. »

®Ash

– – – –
Ash, toujours.
Poète incomparable.
Ces mots
qui sortent des tripes,
des tréfonds
de la douleur
et du désir de vivre.
Comme un cri.
Une exigence.
Et une invitation.
La vie qui crie
qu’elle veut vivre.
Parfois,
je me surprends
dans telle ou telle situation,
à me demander
ce que Ash
aurait saisi du moment
et comment
il l’aurait transformé
en un instant
essentiel.

Tu me manques, poète.
Tu me manques.

Z – 7/2/2025

Sources :
texte : blog tumblr de Ash, 30 déc 2015
photo : Répétitions pour le “Oscar Wilde Ballet” créé par Christopher Weldon avec the Australian Ballet (2024)