– Comment te trouver ?
– Tu ne me trouveras pas. Tu m’as déjà trouvé.
– Mais où es-tu ? Je ne te vois pas, je ne te sens pas
– Vraiment ?
– Sinon… cette sensation que tu es là tout proche, ce désir de te toucher ou être touché par toi.
– Tu vois.
– Mais tu es toujours ailleurs…
– Non. C’est toi qui es ailleurs. Moi, je suis là.
– Alors pourquoi suis-je empêtré par tout ce moi-même qui m’empêche de te voir ?
– Tu l’as dit : parce que tu es empêtré. Lâche…
– Mais…
– Quoi ?
– Mais… S’il n’y avait rien…
– Ah ! La voilà la vraie question de la foi. Celle de la confiance. Soit tu lâches encore un peu de toi. En fait, tout. Et tu avances. Soit tu restes sur le pas de la porte à voir de la lumière entre les jointures, à observer la fête de loin sans t’y laisser inviter.
– Ca paraît si simple et c’est si dur. D’avancer.
– Oui parce que tu te trompes de perspective. Comme souvent, tu considères les choses à l’envers comme dans un miroir, ou comme dans un négatif photographique et tu prends ce que tu vois pour la réalité.
– Je ne comprends pas.
– Essaie d’inverser les verbes de ta dernière phrase : Ca paraît si simple et c’est si dur. Ca donnerait quoi ?
– Ca donne : c’est si simple et ça paraît si dur.
– Voilà qui est juste. C’est exactement cela. Ca “paraît” dur, mais ce n’est qu’une illusion. C’est en fait simple ; il suffit d’être là avec moi. Il n’y a pas d’autre chemin. Arrêter les choses à l’envers, arrêter d’inverser les perspectives. Rentrer en toi pour me trouver plutôt que me chercher à l’extérieur. Toujours plus loin et plus profondément en toi. Donc, en lâchant tes pseudo-sécurités extérieures auquel tu te retiens comme au bastingage d’un bateau qui est en train de couler. Mais plonge ! Rejoins-moi !
– Ce truc-là, d’inverser les mots… C’est un des signes de dyslexie.
– Eh bien, prends-en leçon : pour beaucoup, ce qui empêche d’avancer, c’est cette sorte de dyslexie spirituelle.
Zabulon – 2 septembre 2017
Source image : oeuvre de Sylvain Rabouille, en vente sur son site ainsi que de nombreux autres sujets : sbrartisteblog.wordpress.com
Le sens de notre vie est finalement simplement d’être qui nous sommes, et cela tant qu’un souffle nous est encore prêté.
C’est très simple à dire mais, en vérité, avec l’âge, on découvre qu’être qui nous sommes est un cheminement : être capable de revenir à l’état d’enfance, où l’on se reçoit avec émerveillement sans penser, sans réaction de survie, sans conditionnement. Etre capable de revenir à cet espace caché au fond de nous, qui veut être et qui n’attend que nous pour s’épanouir. Des années durant, nous nous sommes protégés. C’était normal et nécessaire : pur instinct de survie. Nous avons acquis des automatismes, forgé des croyances, bâti une personnalité pour nous protéger. Et, souvent, nous nous sommes identifiés à ces masques qui finissent pourtant par ne plus nous convenir. Ils ne nous conviennent plus d’abord parce qu’ils sont faux, et parce que notre être profond n’y trouve pas ou plus son compte. Et puis surtout, cet être profond veut advenir. Nous sommes sur terre pour cela. Nous sommes vivants pour cela.
Pour que l’expérience de vie soit complète, il nous faut nous retrouver. Cela peut sembler douloureux au départ car il nous faut enlever ces masques auxquels nous nous sommes identifiés et qui nous collent parfois à la peau ou à la mémoire. La peur nous retient : peur de l’inconnu, peur de la vulnérabilité, peur de la nudité. Et paradoxe des paradoxes : la peur d’être, alors que nous sommes ici pour Être. Il y a donc comme une réconciliation avec nous-mêmes à opérer, avec beaucoup d’humilité : peu importe ce que je serai, je serai qui je suis déjà et aspire à être depuis mon origine. La forme ne compte pas. Une fois que l’appel intérieur a été entendu, il faut avancer: c’est le temps des retrouvailles annoncées, le temps de l’espoir, le temps de la joie. Rien, plus rien, ne peut détourner de ce chemin intérieur.
Un deuxième obstacle peut être ressenti au niveau des émotions, et notamment de la tristesse. Celle d’avoir été abandonné, laissé seul, pas reconnu, pas aimé ou pas suffisamment aimé. Cela aussi est un leurre. Dans son développement humain, l’être que nous sommes n’avait peut-être pas les moyens de sentir qu’il était voulu, aimé et éminemment digne et respectable. il a pu développer des stratégies qui sont venues renforcer ou colorer d’une teinte particulière, ici ou là, ses masques. Mais au fond, il est. Et s’il est, c’est qu’il est sans besoin de le mériter, sans besoin de reconnaissance extérieure. Le simple fait d’être dit l’amour de Dieu – certains diront “de l’univers” – à notre endroit. Aussi, un jour, vient également cette révélation intérieure : je suis infiniment aimable par le seul fait que je suis. Je ne suis pas abandonné, je suis invité à me retrouver. Je croyais être perdu, lâché par l’univers. Je suis invité à me retrouver, en moi, en cet espace où tout est stable et sécurisé, cet endroit où l’être que je suis peut s’épanouir.
Un troisième obstacle peut survenir sous la forme de colère. Colère d’être obligé de se battre, colère de devoir se défendre, colère de devoir mener un combat pour survivre. Qu’on l’appelle combat pour la justice, pour la dignité, pour la liberté ou la solidarité, cette colère a les mêmes fondements : il a fallu se battre pour survivre et c’était dur et cela a façonné notre personnalité. Cette colère est parfois encore très présente et fait réagir instinctivement pour des causes que l’on croit justes alors que, quelques justes qu’elles soient, c’est notre réaction qui prédomine comme une réponse, devenue conditionnée, au danger de paraître tel qu’on est : faible, vulnérable, fragile, et si beau ! Parfois la colère est niée et anesthésiée et, au contraire d’être assumée, elle est fuie comme un cataclysme violent qui monterait et n’arrangerait rien. Parfois, elle est à peine perceptible et va se nicher dans des détails imperceptibles pour autrui, une sorte d’exigence faite d’amertume et de regret, le désir d’être parfait par soi-même puisque la vie ne nous donne pas cette perfection. Cette colère, quelque soit sa forme est signe du désir de vivre en nous, fût-ce par le combat. Vient un temps où l’on peut saisir qu’il n’y a rien, ou plus rien, à combattre, mais seulement à être.
Zabulon – 9 juillet 2017
PS – Ce texte m’a été inspiré en réponse au questionnement d’un lecteur internaute assidu. Qu’ils en soit remercié !
Source photo : Gus Kenworthy, champion olympique de ski (médaille d’argent aux Jeux olympiques d’hiver, 2014)
Nous aspirons tous à rentrer à la maison,
dans un lieu où nous ne sommes jamais allés,
un lieu moitié-souvenu et moitié-imaginé
dont nous avons seulement des aperçus
de temps en temps.
Communauté.
Quelque part, il y a des êtres
à qui nous pouvons parler avec passion
sans que les mots restent coincés dans nos gorges.
Quelque part un cercle de mains s’ouvrira pour nous recevoir,
des yeux s’illumineront à notre arrivée, des voix célébreront avec nous
chaque fois que nous entrerons dans notre propre puissance.
Communauté signifie force qui rejoint notre force
pour faire le travail qui a besoin d’être fait,
des bras pour nous tenir quand nous chancelons.
Un cercle de guérison. Un cercle d’amis.
Quelque part où
nous pouvons être libres.
Starhawk
N.B Starhawk est une écrivaine américaine, militante du néopaganisme et de l’écoféminisme, très engagée pour la paix et la non-violence. Elle se définit elle-même comme une “sorcière”, mais pour comprendre dans quel sens elle emploie ce mot, voir l’intéressante chronique publiée sur peripheries.net : la sorcière, c’est l’incomprise, celle qui est mise à distance à cause de son pouvoir ou sa connaissance qui ne trouvaient sens que dans un monde qu’on a fait disparaître et qui désormais fait peur ou dérange.
Revenir…
Voilà une belle chanson issue du folklore américain du début du XIXè siècle, admirablement reprise par Ed Sheeran. Elle évoque ce thème biblique, éternellement humain : je suis un étranger sur cette terre, je vais revenir à la maison. Relu par les esclaves noirs américains, c’était l’espoir christianisé de trouver un jour une terre de retour, Afrique ou Terre Promise. Mais ce serait limité que de s’arrêter là. L’esprit les mots sonnent comme d’autres chants bibliques ou comme le fameux “Return Again” dont nous avons déjà parlé ici, ou encore dans le retour à la maison de Drake, interprété par Nathan Hawes.
Revenir…
Consciemment ou pas, volontairement ou pas, nous sommes partis. Nous savons être en exil. Nous devons revenir. Et ce n’est pas vraiment en un lieu qu’il nous faut revenir. C’est à l’Être. Revenir, cela commence par revenir à nous-même, non pas dans une tentative égoïste de toute-puissance mais dans un acte d’abandon à Celui qui nous donne l’être et l’essence. Nous sommes partis de Lui, nous ne pouvons pas vivre sans Lui. Voilà pourquoi il nous faut revenir, pauvres étrangers voyageurs que nous sommes.
Cela passe par une opération vérité. Impossible de revenir si je me cache à moi-même qui je suis. Voilà pourquoi je ne crains plus d’admettre qui je suis. Le Seigneur m’aime ainsi et m’accueillera ainsi. Tout masque, toute illusion, toute apparence n’a plus cours.
Seulement revenir.
[N.B. (*) Les paroles varient comme pour toute chanson populaire. Ed Sheeran choisit de chanter je reviens vers ma mère, là où d’autres versions disent vers mon père]
I am a poor wayfaring stranger
While traveling through this world of woe
Yet there’s no sickness, toil or danger
In that bright world to which I go
I’m going there to see my father*
I’m going there no more to roam
I’m only going over Jordan
I’m only going over home
I know dark clouds will gather around me
I know my way is rough and steep
Yet beauteous fields lie just before me
Where God’s redeemed, their vigils keep
I’m going there to see my mother*
She said she’d meet me when I come
I’m only going over Jordan
I’m only going over home
Je suis un pauvre étranger voyageur
Alors que je traverse ce monde de malheur
Mais il n’y a pas de maladie, de labeur ou de danger
Dans ce monde lumineux où je vais
Je vais là-bas pour voir mon père*
Je vais là-bas pour mettre fin à mon errance
Je vais seulement par-delà le Jourdain
Je rentre seulement à la maison
Je sais que des nuages sombres s’accumuleront autour de moi
Je sais que mon chemin est rude et escarpé
Pourtant des champs merveilleux s’étendent juste devant moi
Où Dieu a racheté leurs veilles
Je vais là-bas pour voir ma mère*
Elle a dit qu’elle viendrait à ma rencontre quand je viendrai
Je rentre seulement par-delà le Jourdain
Je rentre seulement à la maison
Source photo : Patrick Ribbsaeter dans une campagne pour sauver les derniers éléphants.
Sur le thème, on m’avait dit et c’est pas ça.
Sur le thème, je rêvais et vous m’avez poussé à autre chose.
Sur le thème, c’est dur d’entrer dans la vie que ce monde nous prépare.
Sur le thème, mais laissez-nous donc tranquille et vivre à notre façon.
On nous avait dit que plus tard, en grandissant, tout irait mieux
et voilà qu’on se sent perdu, toujours à compter sur l’avis des autres.
Laissez-nous donc revenir à nos intuitions de jeunesse
au lieu de nous stresser !
Avec un joli jeu de mot :
I care what people think / I care what you think : je tiens compte de ce que vous pensez,
alors qu’en général la formule est plutôt employée au négatif et n’est pas très gentille : “I don’t care what you think“, Je me fiche de ce que vous pensez. Ironie !
Ecouter, écouter tous ces avis bien-pensants qui semblent mieux savoir que l’intuition personnelle de chacun. Stressant !
TWENTY ONE PILOTS – Stressed out
Je voudrais trouver les meilleurs sons que personne n’a jamais entendus,
Je voudrais avoir une meilleure voix pour chanter de meilleurs mots,
Je voudrais trouver des accords à placer dans un ordre nouveau,
Je voudrais ne pas avoir à rimer à chaque fois que je chante,
On m’a dit qu’en grandissant toutes mes peurs diminueraient,
Mais là, maintenant, je me sens fragile et tiens compte de ce que pensent les gens.
Mon nom est Blurryface (face embrouillée) et je tiens compte de ce que vous pensez.
J’aimerais que nous puissions revenir en arrière, au bon vieux temps,
Quand notre maman chantait pour nous endormir, mais maintenant nous sommes stressés.
Nous sommes stressés.
Parfois, une simple odeur me ramène au temps où j’étais petit,
Comment se fait-il que je ne sois jamais capable d’identifier d’où elle vient ?
J’en ferais une bougie parfumée si jamais je retrouvais sa source,
J’essaierais de la vendre, je ne la céderais jamais, je n’en vendrais probablement qu’une,
Et ce serait à mon frère, car nous avons le même air de famille,
Les mêmes fringues, même origine, même pierre jetée dans le ruisseau où nous allions traîner,
Mais ça nous rappellerait le temps où rien n’avait vraiment d’importance,
Entre prêts d’étudiant et cabanes dans les arbres, nous prendrions toujours ces dernières.
Mon nom est Blurryface et je tiens compte de ce que vous pensez..
J’aimerais que nous puissions revenir en arrière, au bon vieux temps,
Quand notre maman chantait pour nous endormir, mais maintenant nous sommes stressés.
Nous jouions à faire semblant, nous nous donnions des noms différents,
Nous construisions une fusée puis l’envoyions voler au loin,
Nous rêvions du cosmos mais maintenant ils nous rient au nez,
En disant, “Redescends sur terre, tu dois gagner ta vie.”
Yeah.
J’aimerais que nous puissions revenir en arrière, au bon vieux temps,
Quand notre maman chantait pour nous endormir, mais maintenant nous sommes stressés.
Nous jouions à faire semblant, nous jouions à faire semblant, mon lapin,
Nous jouions à faire semblant, réveille-toi, ce dont tu as besoin, c’est l’argent
Nous jouions à faire semblant, nous jouions à faire semblant, mon lapin,
Nous jouions à faire semblant, réveille-toi, ce dont tu as besoin, c’est l’argent
Nous jouions à faire semblant, nous nous donnions des noms différents,
Nous construisions une fusée puis l’envoyions voler au loin,
Nous rêvions du cosmos mais maintenant ils nous rient au nez,
En disant, “Redescends sur terre, tu dois gagner ta vie.”
Yeah.
I wish I found some better sounds no one’s ever heard,
I wish I had a better voice that sang some better words,
I wish I found some chords in an order that is new,
I wish I didn’t have to rhyme every time I sang,
I was told when I get older all my fears would shrink,
But now I’m insecure and I care what people think.
My name is Blurryface and I care what you think.
Wish we could turn back time, to the good ol’ days,
When our momma sang us to sleep but now we’re stressed out.
We’re stressed out.
Sometimes a certain smell will take me back to when I was young,
How come I’m never able to identify where it’s coming from?
I’d make a candle out of it if I ever found it,
Try to sell it, never sell out of it, I’d probably only sell one,
It’d be to my brother, ‘cause we have the same nose,
Same clothes, homegrown, a stone’s throw from a creek we used to roam,
But it would remind us of when nothing really mattered,
Out of student loans and treehouse homes we all would take the latter.
My name is Blurryface and I care what you think.
Wish we could turn back time, to the good ol’ days,
When our momma sang us to sleep but now we’re stressed out.
We used to play pretend, give each other different names,
We would build a rocketship and then we’d fly it far away,
Used to dream of outer space but now they’re laughing at our face,
Saying, “wake up, you need to make money.”
Yeah.
Wish we could turn back time, to the good ol’ days,
When our momma sang us to sleep but now we’re stressed out.
Outro (Blurryface)
Used to play pretend, used to play pretend, bunny
We used to play pretend, wake up, you need the money
Used to play pretend, used to play pretend, bunny
We used to play pretend, wake up, you need the money
We used to play pretend, give each other different names,
We would build a rocketship and then we’d fly it far away,
Used to dream of outer space but now they’re laughing at our face,
Saying, “wake up, you need to make money.”
Yeah.